04/02/2014
Rumeur
Viens derrière moi, et laisse dire les gens.
Sois comme une tour, à la cime assurée,
que n'ébranle jamais le souffle des vents ;
car l'homme en qui germe une pensée
sur une autre pensée, s'éloigne de son but :
parce que la fougue de l'une amollit l'autre.
Traduction : Jacqueline Risset
Viens après moi, et laisse dire aux gens :
sois comme ferme tour qui pour galerne
ou tramontane onc sa cime ne branle ;
mais cil en qui pensée dessus pensée
toujours surgeonne, il éloigne son but,
car l'une brise à l'autre sa vigueur.
Traduction : André Pézard
Purgatoire, Chant V, 14-19
Dante Alighieri
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24/01/2014
Naufrage
C'était chez les Grecs un usage
Que sur la mer tous voyageurs
Menaient avec eux en voyage
Singes et Chiens de Bateleurs.
Un navire en cet équipage
non loin d'Athènes fit naufrage.
Sans les dauphins tout eût péri.
Cet animal est fort ami
De notre espèce : en son Histoire
Pline le dit, il le faut croire.
Il sauva donc tout ce qu'il put.
Même un singe en cette occurrence,
Profitant de la ressemblance,
Lui pensa devoir son salut.
Un Dauphin le prit pour un homme,
et sur son dos le fit asseoir
Si gravement qu'on eût cru voir
Ce chanteur que tant on renomme.
Le Dauphin l'allait mettre à bord,
Quand par hasard il lui demande :
" Êtes-vous d'Athènes la grande ?
- Oui, dit l'autre, on m'y connaît fort ;
S'il vous y survient quelque affaire,
Employez-moi ; car mes parents
Y tiennent tous les premiers rangs :
Un mien cousin est Juge-Maire."
Le Dauphin dit bien grand merci.
" Et le Pirée a part aussi
A l'honneur de votre présence ?
Vous le voyez souvent ? je pense.
- Tous les jours : il est mon ami,
C'est une vieille connaissance."
Notre Magot prit pour ce coup
Le nom d'un port pour un nom d'homme.
De telles gens il est beaucoup
Qui prendraient Vaugirard pour Rome,
Et qui, caquetants au plus dru,
Parlent de tout et n'ont rien vu.
Le Dauphin rit, tourne la tête,
Et, le Magot considéré,
Il s'aperçoit qu'il n'a tiré
Du fond des eaux rien qu'une bête.
Il l'y replonge, et va trouver
Quelque homme afin de le sauver.
Le Singe et le Dauphin - Livre Vl - Fable Vll
Jean de la Fontaine
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10/01/2014
Comment lire ?
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12/11/2013
Bonne école
Je ne vois absolument pas comment on pourrait réparer le fait d'avoir négligé de suivre à temps une bonne école. L'homme qui est dans ce cas ne se connaît pas; il traverse la vie sans avoir appris à marcher; ses muscles relâchés se trahissent à chaque pas. Parfois la vie a la clémence de lui revaloir la dure école qui lui a manqué : une longue maladie exigera de lui pendant des années une énergie, une résignation extrêmes; ou bien quelque soudaine misère fondra sur lui, sur sa femme et sur ses enfants, exigeant de lui une activité qui rendra l'énergie aux fibres relâchées et la résistance au vouloir vivre. Ce qu'il y a de plus souhaitable, c'est, dans tous les cas, une discipline rude, quand il en est temps encore, c'est-à-dire à l'âge où l'on est fier de voir exiger beaucoup de soi. Car ce qui distingue la rude école entre toutes les bonnes écoles, c'est que les exigences y sont grandes, qu'elles y sont sévères; que le bien, l'exceptionnel même y sont exigés comme normaux; que la louange y est rare, l'indulgence inconnue, que le blâme y est cinglant, précis, ne tient compte ni de l'origine, ni du talent.
Friedrich Nietzsche - Ecrits posthumes
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29/10/2013
Modestie
Quelle est la chose que l'on expie le plus durement ? La modestie; le fait de n'avoir pas répondu à nos besoins les plus personnels; de nous être confondus avec d'autres; de nous être sous-estimés; d'avoir fermé l'oreille à nos propres instincts; ce manque de respect de soi se venge par toutes sortes de déficiences, dans la santé, dans l'amitié, le bien-être, l'orgueil, la gaîté, la liberté, la fermeté, le courage. Plus tard, on ne se pardonne jamais ce manque d'égoïsme vrai (...)
Friedrich Nietzsche - Ecrits posthumes
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